Jugement Sierra vs Acer : Information du consommateur avant la vente

jurisprudanceNouveau revers pour le constructeur ACER dans une affaire relative à la contestation, par l’un de ses clients, de sa procédure dite de « remboursement » que le fabricant tente d’imposer au mépris le plus élémentaire des droits des consommateurs.


1. Le consommateur doit être informé avant la vente.

Le jugement de Bourges est intéressant, car il fait application de l’article L. 113-3 du Code de la consommation, qui fait peser sur le professionnel, en direction du non-professionnel ou du consommateur, une obligation d’information « sur les prix, les limitations éventuelles de responsabilité contractuelle et les conditions de la vente ».

Le juge, après avoir relevé que le montant du remboursement n’avait pas été porté à la connaissance du client lors de la conclusion du contrat et que « cette absence de détermination du prix du logiciel pré-installé au moment de la vente » expliquait les divergences des parties sur ce montant (le constructeur proposant 30 € pour Vista Home basic, alors que Monsieur Sierra sollicitait « entre 150 et 200 € »), retient que faute pour le constructeur d’avoir satisfait à son obligation d’information « au moment de la vente ou de la prestation de services en jeu », il ne pouvait profiter de son silence pour le déterminer a posteriori et présumer de l’acceptation de ce montant par le consommateur (au regard de R. 132-1). Il condamne donc la société ACER à payer à Monsieur Sierra une somme de 90 €.

2. Un jugement favorable au consommateur.

Ce jugement est favorable au consommateur en ce qu’il considère que le montant proposé au titre de la procédure du constructeur relève des dispositions de l’article L. 113-3 du Code de la consommation et doit donc faire l’objet d’une information préalable. Contrairement à d’autres décisions, le juge fait une exacte appréciation de la notion de « remboursement » et fait un parallèle entre le prix du remboursement qui n’a pas été affiché par le constructeur lors de la vente, et le prix des logiciels pré-installés.

En effet, rembourser, c’est littéralement reverser le prix qui a été payé par le client, et c’est donc celui qui est censé avoir été payé par le consommateur au titre des logiciels pré-installés lors de l’achat. Faute pour le constructeur d’afficher le montant proposé, on ne peut donc pas le fixer a posteriori et présumer de l’accord du consommateur sur ce prix. Par conséquent, le juge condamne ACER à payer à Monsieur Sierra la somme de 90 € et s’abstient fort justement de préciser que c’est au titre du « remboursement ».

3. Il reste encore un peu de chemin à parcourir.

Plusieurs questions ne sont pas encore résolues dans ce jugement, mais cela ne saurait tarder au regard des affaires en cours.

  • D’abord, le juge s’interroge sur la base d’appréciation du montant du « remboursement » : le prix réellement payé par le consommateur ou celui négocié par le constructeur avec Microsoft ? De notre point de vue, la notion de « remboursement » est très claire, et il doit s’agir dans tous les cas du prix réellement facturé au consommateur (il serait aberrant que le constructeur puisse conserver une marge sur un remboursement… !).
  • Ensuite, le juge rappelle qu’il ne lui appartient pas de statuer sur la notion de vente subordonnée (ce n’était pas l’objet du litige).
  • Le juge rappelle également qu’il ne lui appartient pas de statuer sur le caractère abusif de la procédure imposée par le constructeur. Cependant, il fait explicitement référence à l’article R. 132-1 du Code de la consommation, qui liste une série de 12 clauses « noires » qui sont déclarées abusives en tout état de cause et cite la première d’entre elles qui prohibe les clauses des contrats ayant pour objet ou effet de « constater l’adhésion du non-professionnel ou du consommateur à des clauses ne figurant pas dans l’écrit qu’il accepte ou qui sont remises dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n’a pas eu connaissance avant sa conclusion ». Il s’agit là d’un d’une incitation du juge pour discuter du caractère abusif des procédures mises en place par les constructeurs. En effet, en achetant son matériel, qui est assurément l’élément essentiel et déterminant de la vente, le consommateur se trouve contraint d’accepter les termes de ce qu’on pourrait appeler un « contrat de retour », dont au surplus les clauses sont particulièrement abusives : frais d’envois à la charge du consommateur dont le montant est souvent supérieur à la somme versée par le constructeur, immobilisation de la machine pendant un temps indéterminé à la seule discrétion du constructeur, formatage obligatoire du disque dur (et tant pis pour vous si vous y aviez stocké des données personnelles), etc.

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