Procédures collectives des entrepreneurs individuels : du nouveau !

Dans un précédent article, j’évoquais déjà les terribles difficultés rencontrées par les entrepreneurs individuels en procédure collective.

Le processus est invariablement le même : face à des difficultés économiques insurmontables, les entrepreneurs individuels se tournent vers leur expert comptable ou parfois leurs proches, qui leur conseillent d’aller au tribunal de commerce pour « déposer le bilan » comme on l’entend encore, ce qui correspond à déclarer la cessation des paiements..

C’est souvent le point de non retour.

Je vous propose quelques rappels sur la droit antérieur et les apports de la loi du 14 février 2022.

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Les conditions générales : panorama et solutions

De nombreuses entreprises rédigent des conditions générales. Il peut s’agir de conditions générales de vente (CGV) ou d’achat (CGA).

Les conditions générales constituent l’offre par laquelle le professionnel détermine sa politique commerciale, c’est-à-dire les conditions auxquelles il entend négocier et contracter avec un autre partenaire (comme par exemple l’acquéreur de ses produits). Elles fixent la détermination du prix, les conditions de règlement, les règles de transfert de propriété, le tribunal compétent, la loi applicable, et de nombreuses autres choses. Et lorsqu’elles sont signées, les conditions générales deviennent un véritable contrat.

Néanmoins, il faut bien distinguer le contrat des conditions générales. En imageant un peu la chose, le contrat serait un contenant et les conditions générales un contenu.

C’est l’objet de notre article aujourd’hui.

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Exécution des contrats et Covid-19 : un cas de force majeure ?

Si l’épidémie du Covid-19 est d’abord et surtout un drame humain, elle pose aussi de nombreuses questions juridiques.

Vous avez réservé chez un traiteur pour votre mariage, vous êtes commerçant et devez approvisionner vos distributeurs partenaires ou bien vous avez réservé une location pour vos vacances d’avril ?

Vous vous demandez légitimement ce qu’il va advenir de votre situation contractuelle. Devez-vous payer le traiteur, livrer les biens commandés par les clients ou payer votre location ?

À cause du Covid-19, de nombreux projets sont remis en question, et de nombreuses personnes ne peuvent plus exécuter leurs contrats. Il convient donc de savoir si ce virus constitue un cas de force majeure.

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Deroo vs Sony Europe : un arrêt sans surprise de la Cour de cassation

J’ai tardé à commenter ce nouvel arrêt du 14 décembre 2016. Sans doute écœuré par l’issue de cette affaire que je pressentais.

Dans mon précédent article sur l’arrêt rendu par la la CJUE le 7 septembre 2016, je m’étais étonné des questions préjudicielles posées par la Cour de cassation et avais déploré le manque de réalisme de la Cour de justice de l’Union qui a, ni plus ni moins, esquivé le fond du problème. J’estimais alors qu’il ne fallait rien attendre de la « solution » qui serait donnée par la Cour de cassation et j’avais raison, malheureusement.

Voici mon analyse.


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Retour vers le futur… la Cour de cassation.

Incessamment, la Cour de cassation va se « prononcer » à la suite de l’arrêt rendu par la CJUE le 7 septembre dernier.

La marge de manœuvre est infime.

Je soutiens en substance que si la CJUE a réglé le sort de la pratique commerciale d’une « offre conjointe » (sur la base des questions posées par la Cour de cassation),  le débat portait bien sur une autre pratique commerciale dénoncée, celle de la fourniture de produits non demandés.

L’article L. 122-3 du Code de la consommation (en vigueur à la date des faits) issu de la transposition du point 29 de l’annexe 1 de la directive 2005/29/CE, précisait bien :

« La fourniture de biens ou de services sans commande préalable du consommateur est interdite lorsqu’elle fait l’objet d’une demande de paiement. Aucune obligation ne peut être mise à la charge du consommateur qui reçoit un bien ou une prestation de service en violation de cette interdiction. »

Comme je l’indique dans le mémoire complémentaire :

L’hypothèse visée en l’espèce par ces textes est celle dans laquelle un professionnel impose au consommateur le paiement de services qu’il a fournis, sans que ce dernier les ait préalablement commandés (la CJUE précise elle même « fournitures non demandées » dans son arrêt).
En d’autres termes, c’est la pratique commerciale du « préchargement des logiciels », qui doit être vérifiée par la Cour de cassation, puisque l’arrêt de la Cour d’appel a statué sur les demandes qui avaient été formulées de ce chef par Monsieur DEROO-BLANQUART au cours des débats.

Dans l’hypothèse où nous sommes tous d’accord sur le fait que c’est le constructeur qui décide de fournir des logiciels au consommateur, de façon préchargée en usine dans la machine, il n’est pas contestable que nous sommes en présence d’une pratique commerciale de « fourniture de produits non demandés ».

clavierTexte700Comme je l’ai toujours indiqué, il ne faut pas confondre la nécessaire commande préalable des logiciels par le consommateur avec la connaissance préalable par ce consommateur que des logiciels lui sont fournis par le professionnel. Car enfin…. la connaissance préalable du recours à une pratique commerciale déloyale n’est pas censé ôter le caractère déloyal de cette pratique commerciale !! Elle est même considérée comme déloyale « en toutes circonstances » par la directive, sans que le juge ait à apprécier ou non les circonstances de la cause [1] : elle est déloyale car réputée « agressive » en toutes circonstances, point final.

Et comment la directive définit-elle le caractère agressif d’une pratique commerciale ? C’est celle qui « altère ou est susceptible d’altérer de manière significative, du fait du harcèlement, de la contrainte, y compris le recours à la force physique, ou d’une influence injustifiée, la liberté de choix ou de conduite du consommateur moyen à l’égard d’un produit, et, par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. »

Je maintiens donc que le préchargement des logiciels est une contrainte qui a amené ce consommateur a prendre une décision qu’il n’aurait pas prise autrement, puisqu’il ressort des débats qu’il avait demandé à ne pas payer les logiciels qu’il n’avait pas commandés.

En tout état de cause, j’ai rappelé que la CJUE avait précisé dans son arrêt son attachement au « contrat » conclu par le consommateur. Outre le fait que la CJUE n’a pas relevé que le consommateur avait été informé des termes du contrat seulement après la vente (ce qui est interdit), le CLUF (ou Contrat de Licence Utilisateur Final) du Windows fourni préchargé précisait :

« En utilisant le logiciel, vous acceptez ces termes. Si vous ne les acceptez pas, n’utilisez pas le logiciel et contactez le fabricant ou l’installateur afin de connaître leurs modalités de retour des marchandises pour obtenir un remboursement ou un avoir »

Alors, on le respecte ce contrat illégal ou non ?

Mais mon petit doigt me dit que la Cour de cassation va botter en touche…

Sur la question du prix, la CJUE s’est également fourvoyée :

« 51    Par conséquent, eu égard au contexte d’une offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels n’est ni de nature à empêcher le consommateur de prendre une décision commerciale en connaissance de cause ni susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. Partant, le prix de chacun de ces logiciels ne constitue pas une information substantielle au sens de l’article 7, paragraphe 4, de la directive 2005/29. »

L’objet du litige, et le pourvoi de mon client n’échappait pas à cette réalité, n’a JAMAIS porté sur le prix de chacun des logiciels !!

Dans la mesure où l’on sait qu’un ordinateur est composé de deux produits distincts, le matériel d’un côté (qui fait l’objet d’un contrat de vente), et les logiciels de l’autre (qui sont juridiquement une prestation de services), c’est la ventilation du prix de ces deux éléments qui seule importe et seule était demandée. Si j’achète une voiture, je ne vais pas demander le prix du moteur, des roues ou de tout autre élément matériel qui constitue la voiture…  mais je peux en revanche demander le prix de l’option du logiciel de cartographie routière.

La solution prise par la CJUE n’est donc d’aucun secours à la solution que doit donner la Cour de cassation.

Mais là encore, j’imagine que je serai renvoyé dans mes 22 mètres.


Notes :

[1] Arrêt du 19 septembre 2013, CHS Tour Services, C-435/11, EU:C:2013:574

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Logiciels préchargés : la CJUE se décrédibilise.

CJUEDans mon dernier article relatif aux pratiques commerciales déloyales des fabricants d’ordinateurs, j’avais dénoncé la « mascarade des états membres et de la commission » européenne face aux réponses qui m’avaient été adressées dans le cadre de l’instruction du dossier de mon client, Monsieur DEROO-BLANQUART. Si vous relisez ce billet, vous pourrez mieux comprendre l’arrêt scandaleux que vient de rendre la huitième chambre de la CJUE le 7 septembre 2016 (dont les fichiers du communiqué de presse n° 86/16 téléchargeable sur le site de la Cour et de l’arrêt révèlent qu’il s’agit de documents au format PDF version 1.5 rédigés à l’aide de Microsoft Word 2010 avec de polices propres à l’éditeur…)

En effet, la CJUE est passée totalement à côté du problème juridique que j’avais initialement soumis. Même si la Cour de cassation avait posé les mauvaises questions, la CJUE était censée avoir le courage nécessaire pour rendre une décision en faveur des consommateurs Européens, en accord avec le droit posé par la directive ; un espoir était donc permis. Mais personnellement, je pense que les enjeux économiques sont bien trop importants… Car dans cette affaire, il ne s’agissait pas d’infliger une amende de quelques centaines de millions d’euros à une multinationale, ce qui représente bien souvent une goutte d’eau pour ces entreprises, mais d’interdire purement et simplement une pratique qui nuit aux consommateurs Européens et qui aurait contraint les fabricants à adapter leur manière de vendre des machines. Après quelques jours de réflexion, dont j’avais besoin pour proposer une analyse que j’espère pertinente, voici mes conclusions.


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10 000 $ pour un Windows 10 non souhaité !

clavierTexte700Cette semaine, un article du Journal Du Net a attiré mon attention. Il est titré « Microsoft condamné à verser 10 000 dollars pour une installation non souhaitée de Windows 10 » Son auteur fait référence à cet article du Seattle Times et nous rapporte qu’une utilisatrice de Windows aux États-Unis s’est vue imposer par la firme de Redmond une mise-à-jour de son système d’exploitation vers Windows 10, ce qui a rendu sa machine inutilisable. Elle a donc poursuivi Microsoft, qui s’est engagé dans cette politique de mise-à-jour forcée des OS Windows 7 et 8.1 lorsque l’outil Windows Update est configuré automatiquement, a obtenu gain de cause et l’a fait condamner à lui payer 10 000 $.

Ce sujet ne pouvait pas rester lettre morte dans mon esprit, tant on constate un décalage entre la France et les États-Unis en matière de pratiques judiciaires.


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Ventes forcées de logiciels devant la CJUE : la mascarade des états membres et de la Commission.

CJUEDans la lutte contre les pratiques commerciales de vente forcée des logiciels avec le matériel informatique, le procès pendant devant la CJUE sur renvoi préjudiciel de la Cour de cassation Française, suit son cours. J’y avais consacré déjà deux articles (le premier, et le deuxième).

La Commission Européenne, ainsi que les Gouvernements Français, Belge et Tchèque ont adressé leurs observations en réponse à la CJUE tout récemment. Tous sont opposés et proposent de répondre par la négative aux trois questions préjudicielles, non seulement pour des motifs erronés en droit, mais qui vont aussi à l’encontre des objectifs même de la directive 2005/29/CE.

Ces observations relèvent manifestement plus de l’opportunité économique d’intérêts à protéger que de l’application même du droit. Et en la matière, le Gouvernement Français se montre particulièrement docile aux intérêts de Redmond…

Je vous propose un petit décryptage des observations en réponse et quelques indications sur les réponses que j’ai faites à mon tour.


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Les pratiques commerciales déloyales devant la CJUE… on avance !

CJUEQuelques mots pour indiquer à mes fidèles lecteurs la progression de mon dossier relatif aux pratiques commerciales déloyales des constructeurs informatiques devant la CJUE.

La date limite du dépôt des mémoires d’observations était fixée au 29 septembre 2015. Et chacune des parties les a transmis en temps et en heure. Nous serons donc prochainement fixés pour une date d’audience. Le suspense est insoutenable !

L’audience étant publique (article 31 du statut de la CJUE), il serait souhaitable que nous soyons accompagnés de tous ceux qui se sont investis sur le sujet depuis de nombreuses années maintenant. Il s’agit de l’aboutissement d’un combat acharné dans des affaires juridiquement très complexes (la preuve, la Cour de cassation n’a pas su trancher la question…). En effet, comme l’indiquait fort justement Xavier Delpech (docteur en droit, rédacteur en chef aux éditions Dalloz), cet arrêt de la Cour de cassation renvoyant l’examen de la question à la CJUE est « l’enième épisode d’un des contentieux les plus abondants du droit de la consommation, ces dernières années ».

Le combat, quelle qu’en soit l’issue, n’aura donc pas été vain car il aura fait progresser les droits des consommateurs sur la question.

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Open Law Europa ou comment repenser l’accès au droit.

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 Open Law Europa, de quoi s’agit-il ?

La direction de l’information légale et administrative (DILA) a lancé un très vaste programme expérimental Européen appelé Open Law (le droit ouvert) :

« Dans le cadre de sa démarche d’ouverture des données publiques, la DILA a souhaité aller plus loin en stimulant la communauté de réutilisateurs des données juridiques. Elle a co-organisé le 30 octobre 2014 avec l’Open World Forum [1], le NUMA et Etalab, un projet d’innovation collaborative afin d’encourager la réutilisation des données juridiques ouvertes et en faire profiter le service public de la diffusion du droit. Ce projet s’inscrit sur le long terme pour encourager les initiatives. »

Le programme d’innovation collaborative « Open Law Europa » a donc vu le jour dans le but de « faire émerger une communauté d’innovateurs autour des données juridiques ouvertes ».

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