Si vous êtes comme moi, membre de plusieurs associations sportives, la question des déductions fiscales anime régulièrement les discussions. Souvent, on trouve des interprétation bien arrêtées, mais assez peu documentées et se fondant en réalité sur d’anciens articles qu’on trouve sur internet.
J’ai donc décidé de vous donner un éclairage spécifique sur la question des déductions fiscales au profit d’associations sportives comprenant les références publiées par l’administration fiscale (« BOI » ou Bulletin Officiel des Impôts), des réponses ministérielles), les ministères et parfois la jurisprudence, afin de vous permettre de vous y retrouver.
1. Le principe des déductions d’impôts.
Les versements effectués au profit de certaines fondations ou associations qui répondent aux conditions fixées à l’article 200-1 du CGI ouvrent droit à réduction d’impôt.
Il s’agit d’une réduction d’impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant dans la limite de 20 % du revenu imposable qui correspondent à des dons et versements, y compris l’abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables domiciliés en France[1].
L’article 200 du CGI identifie aux points a) à g) toute une série de bénéficiaires, ouvrant le droit à déduction. Il s’agit :
a) De fondations ou associations reconnues d’utilité publique sous réserve du 2 bis, de fondations universitaires ou de fondations partenariales mentionnées respectivement aux articles L. 719-12 et L. 719-13 du code de l’éducation et, pour les seuls salariés des entreprises fondatrices ou des entreprises du groupe, au sens de l’article 223 A, auquel appartient l’entreprise fondatrice, de fondations d’entreprise, lorsque ces organismes répondent aux conditions fixées au b ;
b) D’œuvres ou d’organismes d’intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l’achat d’objets ou d’œuvres d’art destinés à rejoindre les collections d’un musée de France accessibles au public, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
Nous nous intéresserons particulièrement au b), mais il est d’ores et déjà important de distinguer les expressions en gras. Les premières sont des associations ou fondations d’utilité publique et les secondes sont des association d’intérêt général ayant un caractère sportif.
2. La notion d’intérêt général.
Ce qui nous intéresse, c’est la notion d’intérêt général dans l’acception fiscale du terme. Il faut trois critères, qui ont été définis par l’administration fiscale :
- que l’activité de l’association ne soit pas lucrative (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20) ;
- que sa gestion soit désintéressée au sens des instructions fiscales des 15 septembre 1998 et 16 février 1999 (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20) ;
- l’œuvre ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes.
3. Un rescrit fiscal obligatoire.
Pour s’assurer de pouvoir bénéficier de cette qualification d’« association d’ intérêt général » permettant d’ouvrir le droit aux déductions fiscales, l’association ou l’organisme doit déposer auprès de la direction des services fiscaux de leur siège, selon les modalités explicitées par l’instruction fiscale du 19 octobre 2004 publiée au Bulletin officiel des impôts sous la référence BOI 13 L-5-04, une demande écrite comportant notamment une présentation précise et complète de leur activité, instaurée par les articles L. 80 A à L. 80 C du LPF :
« L’organisme qui entend bénéficier de la garantie prévue à l’article L. 80 C du livre des procédures fiscales doit en faire la demande auprès de l’administration fiscale. Cette demande doit être présentée selon un modèle fixé par voie réglementaire (voir annexe 2).
L’auteur de la demande doit être clairement identifié et habilité par l’organisme.
Cette demande doit comporter une présentation précise et complète de l’activité exercée par l’organisme ainsi que toutes les informations nécessaires à l’administration pour apprécier si celui-ci relève de l’une des catégories mentionnées aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts.
Elle doit être adressée, par pli recommandé avec demande d’avis de réception, à la direction des services fiscaux du siège de l’organisme. Elle peut également faire l’objet d’un dépôt contre décharge.
La demande doit être enregistrée sur le registre spécifique déjà prévu pour les demandes présentées dans le cadre des 2° et 3° de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales, afin de permettre leur dénombrement et la surveillance du respect des délais prévus. »
Vous trouverez un modèle de lettre à envoyer à l’administration fiscale en cliquant ici.
À défaut, c’est risquer d’encourir l’amende fiscale prévue à l’article 1740 A du code général des impôts.
Par conséquent, contrairement à ce que j’ai pu entendre, parfois avec beaucoup d’aplomb, la possibilité pour une association de délivrer des reçus fiscaux pour le bénéfice de la réduction d’impôt ne dépend pas de son caractère « affilié » à une association d’intérêt général, ou du fait que l’association sportive du département d’à côté qui exerce la même activité bénéficie, elle, de cette possibilité. Il faut dans tous les cas, remplir les critères de l’article 200 du CGI que seule la procédure de rescrit permet. Je détaillerai plus loin cette question de l’affiliation.
Par conséquent, le minimum qu’on puisse attendre d’une association, c’est de respecter les exigences de l’administration fiscale et de mener cette procédure de rescrit en conservant la réponse, sachant qu’une absence de réponse dans les 6 mois vaut acceptation tacite.
4. Les activités à caractère sportif : les clubs amateurs.
Il s’agit d’organismes ou d’associations ayant pour vocation de promouvoir la pratique du sport, tel que les clubs sportifs amateurs par exemple. Le BOI-IR-RICI-250-10-20-10 nous indique:
« Conformément à l’article 200 du CGl, ces dispositions ne concernent que les organismes d’intérêt général. N’ouvrent donc pas droit à la réduction d’impôt les dons faits à des organismes dont l’activité concerne la pratique ou le développement du sport professionnel, qui est lucrative par nature. »
Les comités départementaux olympiques et sportifs (CDOS), émanations départementales du comité national olympique et sportif français doivent avoir des objectifs et des actions conformes à ceux définis par le comité national. Les CDOS, en ce qu’ils contribuent principalement à la défense, au développement et à la coordination des associations sportives au niveau départemental, présentent sans nul doute un caractère sportif (Rép. min. Budget n° 2350 : JOAN Q, 15 janv. 2013, p. 420, L. Tardy ; Dr. fisc. 2013, n° 6, act. 69).
Les réductions d’impôts prévues aux articles 200, 1, b et 238 bis, 1, a du CGI sont accordées au titre des dons effectués par les particuliers et les entreprises au profit d’œuvres ou d’organismes d’intérêt général ayant un caractère notamment sportif. Selon la doctrine administrative, un organisme présente un tel caractère dès lors qu’il a pour vocation de promouvoir la pratique du sport.
5. La question des associations affiliées.
L’administration fiscale nous précise que pour exercer leur action sur l’ensemble du territoire national, les associations reconnues d’utilité publique ont adopté divers types d’organisation interne :
– création au niveau local de structures qui n’ont pas de personnalité juridique distincte ;
– création locale d’associations qui sont reconnues d’utilité publique ;
– création locale d’associations qui ne sont pas reconnues d’utilité publique.
Les versements effectués à ces associations locales ouvrent droit à réduction d’impôt lorsqu’elles remplissent les conditions fixées à l’article 200-1 du CGI (BOI-IR-RICI-250-10-20-20-20120912)
À cet égard, il est utile de rappeler les termes de la réponse ministérielle posée au cours de la 13e législature (Question publiée au JO le : 31/03/2009 page : 2976 et Réponse publiée au JO le : 21/07/2009 page : 7210) :
À cet égard, il est précisé que la circonstance de l’affiliation d’une association à une fédération reconnue d’utilité publique n’est pas de nature à présumer de son éligibilité à l’avantage fiscal. Cela étant, pour sécuriser juridiquement le dispositif applicable en matière de dons, l’article L. 80 C du livre des procédures fiscales a instauré une procédure de rescrit fiscal dont les modalités pratiques d’application sont mentionnées aux articles R*80 C-1 à R*80 C-4 du livre des procédures fiscales précité. Cette procédure permet aux associations d’intérêt général de s’assurer, préalablement à la délivrance des reçus fiscaux, qu’elles relèvent bien d’une des catégories mentionnées à l’article 200 du CGI.
Par conséquent, la circonstance qu’une association soit affiliée à une fédération reconnue d’utilité publique ne permet pas de présumer que les dons qu’elle reçoit ouvrent droit à réduction d’impôt (Rép. Remillier : AN 21-7-2009 n° 45595 ; solution non reprise au Bofip), mais les versements effectués aux associations locales des associations et fondations reconnues d’utilité publique ouvrent droit à réduction d’impôt si elles remplissent elles-mêmes les conditions légales (BOI-IR-RICI-250-10-20-20 n° 30).
6. Les critères : absence totale de contrepartie
Les frais supportés par les bénévoles dans le cadre de leur activité, lorsqu’elle est effectuée strictement pour la réalisation de l’objet social de l’organisme, peuvent soit être remboursés par celui-ci, soit bénéficier de la réduction d’impôt relative aux dons, à condition que le bénévole justifie de la nature et du montant des frais supportés et qu’il renonce expressément à leur remboursement.
Cela implique évidemment que l’association bénéficiaire conserve dans sa comptabilité tous les justifications des frais, accompagnés de la déclaration de renonciation au remboursement de ses frais par le bénévole.
Le bénévolat se caractérise par la participation à l’animation et au fonctionnement de l’association, sans aucune contrepartie ni rémunération sous quelque forme que ce soit, en espèces ou en nature (hormis le remboursement des dépenses engagées par les bénévoles). Ce qui signifie que le don doit être effectué à titre gratuit, sans contrepartie directe ou indirecte telle que cette notion a été précisée dans l’instruction du 4 octobre 1999 (BOI 5-17-99), au profit de son auteur (Rép. min. n° 99214 : JOAN Q, 17 oct. 2006, p. 10854).
L’existence d’une contrepartie s’apprécie donc en fonction de la nature des avantages éventuellement accordés à l’adhérent ou au donateur.
Doivent être distingués les avantages au contenu purement institutionnel ou symbolique, d’une part, des contreparties tangibles sous forme de remise de biens ou de prestations de services, d’autre part.
Pour les contreparties prenant la forme d’un bien ou d’une prestation de services, voici quelques exemples. Sont notamment visés : la remise de divers objets matériels, l’octroi d’avantages financiers ou commerciaux, le service d’une revue, la mise à disposition d’équipements ou installations de manière exclusive ou préférentielle, l’accès privilégié à des conseils, fichiers ou informations de toute nature, ou le remboursement d’assurances pour le compte du bénévole.
Il faut donc bien comprendre que le bénévole ne peut pas tout avoir et qu’il doit faire des choix : prendre l’option de la déduction des frais kilométriques est donc exclusif de toute contrepartie, telle que le remboursement d’assurances, le bénéfice de plongées gratuites sous prétexte d’encadrement lors d’une sortie, ou un abonnement à une revue. Dès lors que les adhérents ou donateurs bénéficient d’une telle contrepartie, les versements qu’ils effectuent sont en principe exclus du champ d’application de la réduction d’impôt.
Il existe toutefois des dérogations, mais elles sont encadrées.
Il est ainsi admis que la remise de menus biens tels que des insignes, timbres décoratifs, étiquettes personnalisées, affiches, épinglettes, cartes de vœux, etc. ne remette pas en cause l’éligibilité des versements au bénéfice de l’avantage fiscal, lorsque les biens remis par l’organisme à chaque adhérent ou donateur au cours d’une même année civile ont une valeur totale faible (au maximum de l’ordre de 65 euros), et qui présente une disproportion marquée avec le montant de la cotisation ou du don versé. Une telle disproportion sera caractérisée par l’existence d’un rapport de 1 à 4 entre la valeur du bien et le montant du don ou de la cotisation. Le montant de 65 euros est fixé dans les mêmes proportions que le montant fixé en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) prévu par les articles 23 N et 28-00 A de l’annexe IV au code général des impôts (CGI).
En pratique, pour une cotisation ou un don de 65 euros, la remise d’un bien dont la valeur (la valeur du bien s’apprécie par référence à son prix de revient toutes taxes comprises pour l’organisme) n’excède pas 16 euros n’est pas de nature à remettre en cause l’éligibilité du versement au bénéfice de l’avantage fiscal. En revanche, pour une cotisation ou un don de 300 euros, la valeur des biens remis ne doit pas excéder un montant d’environ 65 euros.
7. Les bénéficiaires.
En ce qui concerne la notion de bénévole, quelques précisions s’imposent.
Les joueurs d’une association ne répondent pas à la définition fiscale du bénévolat, puisque leur participation à la vie associative a pour contrepartie directe l’accès au sport qu’ils ont choisi de pratiquer ou d’enseigner. Par conséquent, les frais engagés par les joueurs pour la pratique de leur sport ne sont pas éligibles à la réduction d’impôt, même lorsque ces derniers renoncent à leur remboursement.
En revanche, les frais engagés par les entraîneurs, moniteurs, éducateurs ou arbitres strictement au titre de leur activité bénévole, ainsi que ceux supportés par les autres personnes bénévoles de l’association, y compris les dirigeants, sont susceptibles d’ouvrir droit à l’avantage fiscal, par exemple pour les déplacements réalisés lors du transport gratuit des joueurs sur le lieu de leur activité sportive (Question n° 2118 de M. Jacques Valax, Question publiée au JO le : 31/07/2012 page : 4558 et Réponse publiée au JO le : 19/03/2013 page : 3057)
8. Quels frais et à quelles conditions ?
Comme le rappelle le BOFIP (BOI-IR-RICI-250-20) :
Pour ouvrir droit à la réduction d’impôt, les frais doivent correspondre à des dépenses réellement engagées dans le cadre d’une activité exercée en vue strictement de la réalisation de l’objet social de l’organisme et être dûment justifiées (billets de train, factures correspondant à l’achat de biens ou au paiement de prestation de services acquitté par le bénévole pour le compte de l’association, détail du nombre de kilomètres parcourus avec son véhicule personnel pour exercer son activité de bénévole, notes d’essence,…). Chaque pièce justificative doit mentionner précisément l’objet de la dépense ou du déplacement.
Il y a deux possibilités de traitement :
- soit l’abandon à l’association : Les bénévoles renoncent à se faire rembourser par l’association (parce qu’elle ne dispose
pas de la trésorerie nécessaire par exemple), c’est-à-dire qu’ils abandonnent leur créance sur l’association. Dans ce cas, ils peuvent bénéficier de la réduction d’impôts en faveur des dons (art 200 du code général des impôts –CGI-) ; cet abandon de créance s’assimilant à un don. - soit un remboursement « à l’Euro, l’Euro ».
Première solution : L’abandon de remboursement des frais.
Il s’agit des frais engagés, dans le cadre des missions et activités d’un organisme d’intérêt général ; il peut s’agir de frais de déplacement (réunions, manifestations, etc.) mais également d’achat de petit matériel, de documentation, avance sur repas offerts à des artistes occasionnels, etc.
Les frais doivent être dûment justifiés.
Pour les frais kilométriques, il existe un barème spécifique revalorisé chaque année. Ce barème comporte deux tarifs, celui pour les voitures et l’autre pour les motos, et s’applique indépendamment de la puissance fiscale du véhicule automobile ou de la cylindrée des vélomoteurs, scooters ou motos, du type de carburant utilisé et du kilométrage parcouru à raison de l’activité bénévole.
Il faut impérativement que le membre de l’association conserve tous les justificatifs de la réalité et du nombre de kilomètres parcourus à cette occasion.
L’abandon du remboursement des frais engagés doit donner lieu à une déclaration expresse de la part du bénévole, par une mention écrite qui peut être portée sur la note de frais. Par exemple, « Je soussigné (nom et prénom de l’intéressé) certifie renoncer au remboursement des frais ci-dessus et les laisser à l’association comme don (…). » (BOI-IR-RICI-250-20). Étant précisé qu’une attestation sur l’honneur émanant du président de l’association certifiant que « l’association a bénéficié de dépenses engagées par lui-même… » (avec indication du montant) n’est pas jugée suffisante par les tribunaux (CAA Paris 18-2-2014 n° 13PA01400 : RJF 8-9/14 n° 755).
Rappelez-vous, les frais engagés par les adhérents n’ouvrent pas le droit à déduction, de sorte que si vous faites des kilomètres pour pratiquer votre sport, vous ne pouvez rien déduire. Mais si vous êtes encadrant et que vous déplacez les joueurs de votre association, alors vous pourrez déduire des frais kilométriques.
Deuxième solution : le remboursement « à l’Euro, l’Euro »
Les bénévoles qui ne souhaitent pas bénéficier de la réduction d’impôt peuvent se faire rembourser selon les modalités et conditions habituelles de l’association, le cas échéant.
La procédure est la suivante :
- Le bénévole remplit une fiche de frais supportés dans le cadre de son activité bénévole. S’il s’agit de frais de déplacement, il faut préciser la date, les lieux de départ et d’arrivée, l’objet du voyage, le nombre de kilomètres parcourus. Tous les frais liés à ce déplacement (essence, parking) doivent figurer sur cette fiche et être accompagnés des factures ou justificatifs correspondants.
- Les bénévoles et l’association se mettent d’accord sur les modalités de remboursement (prix du repas, montant de l’indemnité kilométrique). Le barème de défraiement peut être celui publié chaque année par l’administration fiscale pour la déduction des frais réels des salariés par exemple, ou celui spécifique à l’abandon des frais engagés par les bénévoles des associations (Cf. ci-dessus).
- L’association rembourse le bénévole.
9. Mon conseil.
Exigez de votre association le respect de ces dispositions. Si cela n’est pas fait, vous prenez le risque de tomber sous le coup de l’amende prévue au code général des impôts (1740 A GCI).
Notes :
[1] Si la réduction d’impôt est le premier niveau de déduction, il existe un deuxième niveau plus complexe qu est l’acceptation de libéralités entre vifs ou testamentaires et le droit de posséder des immeubles.